Pour l’événement, Rio de Janeiro s’est équipé de nouvelles technologies très coûteuses, un investissement lourd qui pourrait ne pas payer sur le long terme d’après une récente étude.
Des millions de dollars investis pour accueillir les Jeux
Alors que les Jeux Olympiques de Rio battent leur plein, une question commence à tarauder bon nombre d’observateurs, perplexes quant aux réelles retombées de l’événement sur la ville et son avenir.
Les villes qui ont l’opportunité d’organiser les Jeux Olympiques ou même d’autres grands événements mondiaux attendent généralement des retombées positives. Pour Rio, qui a déjà reçu la Coupe du monde de football en 2012, l’un des avantages à se retrouver au cœur de gros événements devait être l’augmentation de l’utilisation des nouvelles technologies dans la gestion de la ville, des solutions développées notamment pour aider à l’organisation de ces rendez-vous sportifs internationaux.
Pour la municipalité, la Coupe du monde et les JO devraient permettre à Rio de se positionner à l’avant-garde des smart cities dans la région. Pourtant, une récente étude diffusée en avril dans le Journal of urban technology s’interroge sur le travail exécuté par Rio pour devenir une ville intelligente.
Les chercheurs Christopher Gaffney et Cerianne Robertson ont ainsi analysé deux parties clé de l’ensemble des infrastructures orientées smart city de Rio, des installations spécialement créées pour l’événement : le Integrated Command and Control Center (CICC) et le Rio Operations Center (COR), qui ont en tout coûté 40 millions de dollars à la ville.
« Pour répondre aux obligations contractuelles du Brésil envers la Fifa durant la Coupe du monde, le gouvernement fédéral a développé deux centres de contrôle, un à Brasilia et un autre à Rio de Janeiro… » détaille l’étude. « Ces installations ont fréquemment été citées dans la campagne présidentielle de Dilma Rousseff comme l’héritage majeur laissé par la Coupe du monde. »
Le CICC est un centre de commande où les différentes unités de police, les pompiers, les secours médicaux, la garde municipale ou encore les unités de défense civile se réunissent et peuvent se coordonner. 98 écrans LED sont concentrés dans une pièce, connectés à 500 caméras en circuit fermé installées dans différentes parties de la ville.
Une « smart city » qui montre rapidement ses limites
Pourtant, le système de surveillance et de gestion de Rio a beau être très élaboré, permettant notamment à Rio de remporter le titre de « meilleure ville intelligente de 2013 », il montre rapidement ses limites pour les responsables de l’étude.
D’après Gaffney, l’un des principaux problèmes rencontrés lors de l’utilisation de technologies « smart city » à Rio reste l’inégalité dans laquelle ces solutions sont exploitées. Selon lui, il y a un « smart Rio » et un « non-smart Rio » en fonction des quartiers et du niveau de vie de la population.
« Parce que nous parlons d’une ville très fragmentée et d’une ville très inégalitaire en termes de ressources et de concentration des richesses, les caméras et les agences d’évaluation de données sont principalement situées dans les zones aisées » explique Gaffney.
« Le transit est hautement contrôlé mais cette surveillance concerne majoritairement les voitures que seuls les personnes riches sont en mesure de posséder. C’est un système qui tend à réaffirmer des inégalités qui existent déjà ». ajoute-t-il.
D’après l’étude, des limites se retrouvent également sur le terrain sécuritaire. Les zones de grande affluence sont davantage contrôlées, explique Gaffney. Quant à la surveillance qui doit permettre à la ville de prévenir des désastres naturels, elle est mise à mal par une mauvaise gestion de la part du gouvernement.
Une des fonctions du système « smart city » de Rio est de pouvoir, en théorie, prévenir la population à coup de sirènes en cas de potentielles coulées de boues provoquées par une inondation. « Mais récemment, l’entreprise qui gère ces alarmes n’a pas reçu son chèque du gouvernement et désormais les sirènes sont muettes. » indique Gaffney.
Ces quelques exemples illustrent les raisons qui poussent les chercheurs à l’origine de l’étude à être pessimistes quant à l’impact que peuvent avoir de tels événements sur la transformation de Rio en « smart city ».