Dans un marché du transport maritime où la concurrence fait rage, les ports français tentent de maintenir leurs positions, sinon dans le monde, au moins en Europe. Pour cela, Marseille et Le Havre sont en train de se doter d’outils intelligents augmentant leur efficacité – une nécessité, devant l’avance prise par Rotterdam, Hambourg ou Anvers en la matière !

Les grandes manœuvres sont lancées. Les ports de Marseille et du Havre ont lancé d’ambitieux projets de développement de solutions intelligentes pour leurs ports, afin de continuer à accueillir des marchandises venues du monde entier.

Le transport maritime : un secteur en pleine mutation et en plein essor, générateur de pollution

Le transport maritime est en effet un secteur en pleine mutation et en plein essor : après avoir connu un ralentissement, il est reparti à la hausse, pour dépasser en 2014, les 10 milliards de tonnes de marchandises transportées en un an – ce qui représente, aujourd’hui, 80% du commerce international en volume et 70% en valeur.

Ouvrons au passage une parenthèse sur le poids du transport maritime dans la pollutions des airs, des eaux et dans les émission de gaz à effet de serre. Le taux de soufre du fioul lourd qui propulse une majorité des bâtiments est 100 fois supérieur à celui du diesel ; on le juge responsable de quelque 50 000 morts prématurées en Europe. Le taux de particules fines dans un port est 400 fois supérieur à celui de l’intérieur des terres et plus de 50 fois supérieurs à celui d’un bord d’autoroute !

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Les émissions de gaz à effet de serre du transport maritime représentent à elles seules 2,5% du total mondial : sans changement de politique en la matière, elles devraient être multipliées par 2,5 d’ici 2050. L’Organisation maritime internationale (OMI) s’est engagée à les diminuer par deux d’ici à cette échéance : deux grands axes de travail existent en la matière :

  • inventer ou développer des moyens de propulsion plus propres (l’hydrogène produit à partir d’électricité renouvelable semble un excellent compromis)
  • améliorer l’efficacité énergétique des bateaux, notamment des moteurs et des chaudières

Parenthèse refermée.

Un marché dominé par l’Asie

Le secteur du transport maritime est l’un de ceux, dans l’économie mondiale, où le basculement vers l’Asie est le plus franc : en 2015, les huit plus grands ports mondiaux pour le trafic de marchandises étaient tous asiatiques – sept ports chinois plus Singapour.

Sur le top 20, seuls trois ports ne venaient pas du continent asiatique – dont Rotterdam, 9ème avec 466 millions de tonnes, seul port européen à se maintenir dans le gotha mondial. Derrière, Anvers, 23ème avec 208,4 millions de tonnes et Hambourg, 34ème avec 137,8 millions de tonnes, étaient les seuls autres ports européens à dépasser les 100 millions de tonnes.

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Marseille et Le Havre, seuls ports français dans le top 10 européen

Aujourd’hui, dans l’Union Européenne, les ports sont donc davantage en concurrence les uns avec les autres pour assurer le commerce entre l’Europe et le reste du monde, notamment l’Asie et la Chine. La France compte deux ports dans le top 10 européen : Marseille, 6ème avec 81,9 millions de tonnes et Le Havre, 9ème avec 68,2 millions de tonnes.

En la matière, l’impact de la révolution numérique devient crucial pour maintenir sa place dans un marché concurrentiel et en mutation : « Si l’accessibilité  maritime et terrestre restent des critères qui font que l’on fait plus confiance à un port qu’à un autre, la dimension smart port devient critique » note Baptiste Maurand, directeur adjoint du port du Havre.

Rotterdam : un port automatisé, truffé de capteurs et de solutions smart

Or, en la matière, c’est peu dire que les ports du Nord de l’Europe ont pris une grande longueur d’avance. Le port de Rotterdam a été automatisé dès 1993, il s’est doté de solutions intelligentes facilitant la localisation des marchandises, navires et camion pour fluidifier en temps réel leur transit.

Fin janvier 2018, Rotterdam a signé un partenariat pluriannuel avec IBM pour connecter l’ensemble du port : des centaines de capteurs vont être installés, remontant des informations sur un tableau unique qui proposera des données en temps réel sur la météo, les courants, le niveau de l’eau, les disponibilités d’amarrage…

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Rotterdam s’appuie également sur une belle synergie avec son écosystème local : « Le port de Rotterdam est un véritable lieu de création de valeur avec des incubateurs et des campus étudiants. C’est un lieu ouvert qui est lié à la vie de la ville » expose Carlos Moreno, chercheur et spécialiste du concept de smart city

Hambourg, des solutions smart pour fluidifier le trafic et la logistique

Ce lien très fort unissant le port et la ville est également l’apanage de Hambourg, le modèle européen en terme de smart port : « Le port de Hambourg crée de l’énergie grâce aux éoliennes qu’il a installées. Le port contribue à rendre la ville plus belle. Finalement, le port et la ville ne font qu’un et poursuivent les mêmes objectifs. C’est vers cela qu’il faut tendre« , note Carlos Moreno.

Travaillant depuis avril 2014 avec Cisco, spécialiste logiciel américain, le port de Hambourg a développé ses propres solutions intelligentes pour résoudre ses problèmes de circulation de camions et les embouteillages résultant du moindre contre-temps, mais aussi pour anticiper les problématiques de logistiques en fonction de l’historique et des données en temps réel.

Ces technologies lui permette également de maintenir à jour, en permanence, le transit des marchandises, les arrivées et départs des bateaux et camions, pour simplifier l’usage quotidien du port et tenir les clients informés en temps réel.

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La ville en a également profité pour doter le port d’un éclairage intelligent, variant en fonction de la présence ou non de personnes, ainsi que de feux de signalisation intelligents pour fluidifier le trafic.

Anvers, convertie toute entière à la Smart City

La ville d’Anvers, second port européen, s’est également lancé dans une démarche globale, voici quatre ans, visant à devenir à court terme« la ville la plus intelligente de Belgique », et devenir un exemple européen en terme de solutions smart.

Le port est évidemment intégré dans cette problématique, notamment pour les questions de trafic de camions et de marchandises, mais aussi dans l’intégration de l’écosystème local à la résolution des problématique d’une ville portuaire. En quelques années la ville s’est couverte de centaines de milliers de capteurs.

Face à cette débauche technologiques, nos ports français semblent pour l’heure bien mal armés. Mais, pour rattraper ce retard, Marseille et Le Havre fourmillent de projet. Rendez-vous demain, dans la suite de notre étude, pour les découvrir.

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