Réduire l’empreinte carbone du transport est un des objectifs de la transition énergétique. Et, s’il y a bien un mode de transport qui semble difficile, voire impossible, à convertir aux énergies vertes, c’est bien l’aviation. Pour autant, des expérimentations se poursuivent, en flux continu, pour développer un avion électrique ou hybride. Réaliste sur le court courrier, la technologie risque de buter sur les vols moyen et long courrier.

La transition énergétique doit passer par le secteur des transports. Pour l’automobile (y compris les camions), l’électrification semble de loin la technologie la plus mature, même si la pile à combustible (avec une réserve d’hydrogène) n’a pas dit sont dernier mot.

Pour les trains, l’électrique se généralise et, pour les lignes trop onéreuses à électrifier, l’hydrogène semble une bonne alternative aux combustibles fossiles. Pour le transport maritime, les moteurs électriques sont déjà opérationnels pour les petits bateaux ; pour les cargos et autres géants des mers, l’hydrogène associé à des sources de production renouvelable sont la piste la plus sérieuse.

L’aviation émet 2,5% du CO2 mondial

En revanche, le transport aérien peine encore à trouver de nouveaux modèles pour réduire ses émissions de CO2 : l’aviation compte pourtant, à elle seule, pour 2,5% de ces émissions. Une des solution serait de supprimer l’avion pour les transports de voyageurs longue distance intercontinentaux, en développant de nouveaux modes de transport comme l’hyperloop. Mais, en attendant les avancées de l’invention d’Elon Musk, des chercheurs planchent sur le développement de moteur électrique ou hybride dans l’aviation.

Au-delà des aventuriers des airs, comme Raphaël Dinelli et son Eraole (un avion électrique monoplace, avec lequel il compte rééditer l’exploit de Charles Lindberg en traversant l’Atlantique), plusieurs firmes progressent dans la réalisation de leurs prototypes d’avions de transport de passagers. Easyjet a promis de relier Paris à Londres avec un avion électrique pouvant transporter entre 100 et 220 passagers, sans préciser la technologie utilisée.

experimentations avion electrique hybride - Les Smart Grids

Airbus : dix ans de recherche sur l’avion électrique

Airbus, de son coté, planche depuis plus de dix ans sur l’avion électrique. Le constructeur européen termine, avec l’allemand Siemens et le motoriste britannique Rolls-Royce, un premier prototype d’avion hybride pour l’aviation commerciale.

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Reste à savoir quelle sera la part d’électrique utilisée par le démonstrateur, mais il promet, quoiqu’il arrive, de réduire la consommation de kérosène. Baptisé E-Fan X, son premier vol est programmé pour 2020.

Parallèlement, Airbus vient de démarrer, avec la compagnie aérienne scandinave SAS, une vaste étude de l’écosystème et des besoins en avions électriques et hybrides électriques à grande échelle. Elle s’achèvera en 2020, et explorera les technologies pour les avions, mais aussi les adaptations qu’ils imposeront aux installations aéroportuaire. La compagnie SAS a prévu de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 25% d’ici 2030.

Une taille limitée par la densité des batteries

Il n’en reste pas moins que, pour des avions de 100 places et plus, les limites technologiques actuelles empêchent d’imaginer des modèles 100% électriques. En cause, avant toute autre raison : la densité des batteries.

« Les spécialistes des batteries nous disent qu’ils n’ont pas dans les cartons ce qu’il nous faudrait (…).  Les batteries électriques, qui ont aujourd’hui une puissance de 200 watts-heure par kilogramme [Wh/kg], sont trop faibles. Même si l’on multiplie par 5 pour arriver à 1.000 Wh/kg (ce qui est au-delà des feuilles de route des fabricants de batteries), il faudrait donc entre 150 et 180 tonnes de batteries, ce qui demanderait un avion 3,5 fois plus grand que l’A320″, détaille Stéphane Cueille, directeur de l’innovation et de la R&T du groupe aéronautique français Safran. Autant dire que l’avion imaginé par Easyjet a peu de chance de voler en 2030 – ou il s’agira d’un modèle !

Autre piste envisagée : utiliser une pile à combustible associée à des réserves d’hydrogène. En terme d’encombrement et de poids, cette solutions serait comparables aux combustibles fossiles actuellement utilisés. Mais elle présente de tels risques en termes de sécurité qu’elle est pour l’heure exclue. Le moindre incident risquerait en effet de faire exploser l’avion.

L’électrique, efficace pour les vols courts-courrier, « saut de puce »

Les batteries semblent donc, pour l’heure, la technologie la plus sûre pour électrifier tout ou partie du moteur d’un avion. Safran, justement, s’est lancé dans cette course, avec en ligne de mire les vols de court courrier, ou saut de puce, d’une trentaine de kilomètres, dans les zones insulaires ou désertiques. Peu usité en Europe, ce marché est assez développé aux Etats-Unis et en Asie du Sud-Est.

Safran travaille ainsi à un projet d’aéronef à voilure fixe de 12 places, à moteur hybride, permettant, suivant la distance à parcourir, d’effectuer des vols soit 100% électriques, soit hybrides. Ces avions devraient voir le jour en 2025. Le groupe français investit énormément dans la recherche sur ce secteur : « Il y a des barrières importantes pour aller jusqu’à l’aviation commerciale. Pour autant, si on ne peut pas parier sur le tout-électrique ou le fortement hybride, on ne peut pas non plus parier que ça n’arrivera pas. Il faut être prêts. Il y a une tendance de long terme », note Stéphane Cueille.

Ampaire : la start-up en pôle des bimoteurs électriques

Pour autant, Safran va devoir rattraper les pionniers de ces technologies, comme l’américain Ampaire. La start-up vient de faire voler pour la première fois son prototype, un Cessna 337 Skymaster (le mythique bimoteur des années 1960) modifié et rebaptisé Ampaire 337. Avec ses quatre places en plus du pilote, Ampère peut se targuer de présenter au monde « l’avion hybride-électrique de plus grande capacité ayant jamais volé ».

La start-up envisage d’ailleurs d’ouvrir une ligne commerciale pilote sur l’île hawaïenne de Maui, avec un prototype de pré-production, en partenariat avec la compagnie Mokulele. Un autre projet de ce type pourrait voir le jour à Porto Rico.

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Quid des biocarburants ?

Si ces solutions semblent viables à court terme pour des trajets de moins de 50 kilomètres et moins de 20 passagers, l’horizon 2030 paraît inatteignables pour les vols moyens-courrier. Mais il semble réaliste de convertir, à terme, ces avions responsables de plus de 70% des émissions du secteur, aux moteurs électriques ou hybride.

Quant aux vols longs-courriers, même un moteur faiblement hybride semble tout simplement inapplicables. Pour réduire les émissions de ces avions, seuls les biocarburants (produits de manière 100% responsables) semblent une voie actuellement mature. Mais elle peine à s’imposer. L’aviation est donc, malgré tous ses efforts prometteurs, encore très loin de la neutralité carbone.

 

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