Souffrant actuellement d’un blocage administratif au niveau de l’autorité environnemental, la filière reste rentable et pourvoyeuse d’emplois. De plus la PPE vient enfin de relever les objectifs de construction de parc éoliens pour 2028. Une bonne nouvelle, même si le potentiel français pourrait permettre d’en faire plus, notamment sur l’éolien en mer.

Nous avons vu, dans la première partie de notre étude, que la puissance éolienne raccordée en 2018 en France était en retrait par rapport à 2017. Mais une réforme du système de recours et de la répartition fiscale devrait doper la construction de nouveaux parcs éoliens dans les années à venir, dans des délais plus court. L’ensemble de ces analyses s’appuient sur le Baromètre 2018 de l’Oberv’ER.

La délicate question de l’autorité environnementale

Pour autant, l’année 2018 de la filière a été polluée par une décision de Conseil d’Etat, fin décembre 2017. Jusqu’ici, le préfet de région était l’autorité responsable de l’évaluation environnementale d’un projet d’éolien. Mais comme, dans certains cas, ce même préfet était l’autorité qui avait instruit la demande d’autorisation administrative du projet en question, le Conseil d’Etat a estimé que cette situation pouvait générer des conflits d’intérêt. Dès lors, les sages ont retiré au préfet cette compétence. Pire, cette décision a eu un effet rétroactif pour les projets ayant obtenu une autorisation mais n’ayant pas commencé les travaux.

Les projets éoliens en cours se sont donc retrouvé sans interlocuteur sur cette question cruciale. Ni le Conseil d’Etat, ni le gouvernement, ni aucune autre autorité n’a en effet décidé qui prendrait le relai des préfets. Dans l’urgence, les missions régionales d’autorité environnementale (MRAE) ont assuré la continuité de service. Mais sans avoir les effectifs ou l’expertise nécessaires pour traiter correctement cette délicate question.

Un manque de visibilité qui ralentit l’ensemble des projets

Par ailleurs, rien n’assure aux professionnels que les décisions de validation environnementale de ces MRAE soient juridiquement inattaquables. Le risque d’une contestation et d’une annulation de ces décisions est réel. Dans un contexte où les projets éolien font souvent l’objet de recours, de nombreux professionnels ont préféré gelé leurs projets éoliens. Cela peut expliquer le recul dans les raccordement d’éoliennes au réseau en 2018 en France.

Mais ce sont surtout les projets futurs qui ont été durement touché par cette vacance administrative, avec un impact négatif sur les délais d’instruction des projets en cours. A voir si l’accélération provoquée par les autres décisions de l’année 2018 compensera ce retard, ou si l’année 2019 sera également décevante en terme de puissance raccordée.

L’appel d’offre de juin 2018 : un désert pour l’éolien

Cette décision du Conseil d’Etat se répercute également sur le front des appels d’offre. Rappelons que depuis 2017, la CRE a supprimé le principe du guichet ouvert pour les nouveaux projets éoliens, le remplaçant par des dates d’appel d’offre, un procédé devenu la règle pour les centrales renouvelables dépassant une certaine puissance (500 kW ou 1 MW selon les filières).

Depuis cette réforme, deux appels d’offre ont eu lieu pour l’éolien. Leur seul critère était le prix plafond de l’électricité produite. Celui de novembre 2017 a été un succès, avec treize projets retenus pour un excellent prix moyen de 65,4 euro par MWh (le prix plafond était de74,8 euros par MWh), et 508 MW de puissance en tout.

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Mais celui de juin 2018 s’est apparenté à un désert, en grande partie à cause de cette incertitude administrative. L’objectif de la CRE était d’attribuer 500 MW ; seuls 300 MW ont été déposés, pour seulement 118 MW attribués en septembre 2018.

Une année difficile pour une filière rentable, dynamique et pourvoyeuse d’emplois

Dans la foulée de ces résultats, la CRE a décidé de repousser les appels d’offre suivants en avril 2019 (au lieu de janvier) et en août 2019 (au lieu de juin) et d’en augmenter le volume, respectivement à 630 MW et 752 MW (au lieu de deux fois 500 MW). L’année 2018 marquera donc un creux dans l’attribution des parcs, qui devraient être rattrapé durant l’année 2019, si tout va bien.

Au final, 2018 aura été une année de recul et de retard pour la filière en France, tant pour les attributions, les validations administratives ou les raccordements. Pour autant, la rentabilité de l’éolien ne cesse de progresser, et les prix de vente de baisser, signe d’une maturité de la filière. Le chiffre d’affaire de l’éolien est évalué, pour l’année 2017, à 5,183 milliards d’euros, soit trois fois plus qu’en 2006. 14% de ce chiffre d’affaire concerne l’export, preuve d’une expertise française reconnue en la matière.

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L’éolien est aussi l’énergie renouvelable la plus pourvoyeuse d’emplois en France, et l’un des secteurs les plus dynamiques à ce niveau, toutes activités confondues. En 2017, 17 100 personnes étaient employés par la filière, en augmentation de 7,8% par rapport à 2016 (soit 1 230 nouveaux postes). De plus la construction d’un projet éolien a un impact fort sur l’activité locale, en donnant du travail à des entreprises  (terrassement, béton, raccordement au réseau), puis en offrant des emplois durables en exploitation et maintenance.

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Une nouvelle PPE qui satisfait les acteurs de la filière éolienne

L’année s’est achevée par la publication de la très attendue nouvelle PPE. Elle a satisfait les acteurs de la filière de l’éolien terrestre, avec un objectif de 24,6 GW de puissance installée fin 2023 et entre 34,1 et 35,6 GW en 2028 – contre 14,2 GW fin septembre. Cela signifie une franche accélération des raccordements, pour atteindre en moyenne 2 GW par an sur la période – en sachant que 2019 a peu de chance d’atteindre ce chiffre. Il s’agira donc, pour le gouvernement, de singulièrement augmenter la fréquence ou la puissance de ses appels d’offre, tout en veillant à ce que les mesures du groupe de travail éolien, visant à réduire les délais de mise en service des parcs éoliens, soient efficaces.

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« Dès l’année prochaine, la filière devra installer environ 2 GW par an. Ceci est largement atteignable, à condition que tous les freins soient levés, notamment l’absence d’autorité environnementale et l’application des mesures du groupe de travail Lecornu » a ainsi déclaré Matthieu Monnier.

La France manque de confiance dans l’offshore

En revanche, sur l’éolien offshore, les acteurs de la filière sont beaucoup plus mitigés face à la nouvelle PPE : « l’objectif de 4,7-5,2 GW installé est très inférieur à nos attentes. Il y a déjà 3,5 GW engagés par de précédents appels d’offre, donc le gouvernement ne proposent qu’1,2 GW à installer d’ici 2028. Ce n’est vraiment pas à la hauteur au regard de la compétitivité de la technologie posée, proche du prix du marché désormais » développe Matthieu Monnier.

C’est d’autant plus vrai que la France possède un solide potentiel en la matière, estimé à 30 GW (le deuxième en Europe derrière le Royaume-Uni).

Une accélération, mais pas encore la révolution nécessaire (et réalisable)

Da façon plus générale, cette PPE marque certes une accélération sur le déploiement de l’éolien, mais pas encore une révolution. Le potentiel français permettrait de faire plus, en engageant une politique de grands travaux, accompagnés de simplifications administratives encore plus importantes. Une telle ambition nécessiterait, en parallèle, d’augmenter le rythme de déploiement des smart grids et des unités de stockage de grande capacité, afin de sécuriser l’approvisionnement électrique et accepter plus de renouvelables intermittents sur le réseau.

La France se contente, pour l’heure, d’une nette évolution vers la transition énergétique, alors que le pays dispose des moyens techniques et financiers d’engager une révolution des renouvelables, en s’appuyant notamment sur l’éolien. Une nouvelle occasion manquée.

 

 

 

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