Le gouvernement français vient d’annoncer la mise en place d’un plan solaire, avec de bonnes mesures, mais rien de révolutionnaire, loin de la politique de grands travaux solaires qu’impose l’urgence climatique.

Concernant le développement des énergies renouvelables en France, le rendez-vous incontournable de l’année 2018 sera la publication de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) pour la période 2019-2028, qui devrait être dévoilé durant l’été et finalisé d’ici la fin de l’année.

Solaire en France : un retard à rattraper

Pour autant, la stratégie gouvernementale continue de se dévoiler. Ainsi, jeudi 28 juin, le secrétaire d’Etat à la transition écologique et solidaire, Sébastien Lecornu, a rendu public le très attendu « plan solaire », censé booster le développement d’une énergie pour laquelle la France dispose du cinquième potentiel d’Europe mais accuse un retard conséquent.

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1,6% de l’électricité française est d’origine solaire, contre 6% en Allemagne, par exemple, alors que les coûts des différentes technologies solaires (notamment le photovoltaïque) ont encore chuté de 11% en 2017 pour atteindre 55 euros le MW.

« Place au soleil » : un plan pour favoriser l’autoconsommation et mobiliser du foncier

Un groupe de travail a été mandaté pour réussir à lever les freins et leviers au déploiement à très grande échelle du solaire, dans la lignée du plan solaire présenté par EDF en début d’année. L’énergéticien y dévoilait sa bonne volonté à vouloir accompagner un investissement massif dans les énergies solaires, pour installer 30 GW de puissance solaire supplémentaire d’ici 2030 – la France plafonne pour l’heure à 8 GW installés, en dessous de ses objectifs.

Les décisions du groupe de travail ont été réunies dans ce plan « Place au soleil », visant notamment à encourager l’autoconsommation et à mobiliser des surfaces foncières pour y installer des panneaux photovoltaïque. Ce plan est composé de trois grands volets : le secteur agricole, les particuliers, les grandes entreprises et corps d’Etat.

Au soutien de l’autoconsommation agricole et chez les particuliers

Du coté des exploitations agricoles, qui accueillent déjà 13% des installations de photovoltaïque et 3% des parcs solaires thermiques, le plan propose de doubler le volume des appels d’offres pour l’agrivoltaïsme (cohabitation de panneaux et de cultures), ainsi qu’une augmentation de 50% des volumes d’appels d’offres pour les toits.

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Au niveau des particuliers, le gouvernement va maintenir les mesures d’incitation à l’autoconsommation photovoltaïque (TVA à taux réduits, exonération), tout en augmentant le soutien à la filière chauffage photovoltaïque. Les primes à l’achat de chauffages et chauffe-eau solaires vont être revues à la hausse en 2019, tout en préparant l’obligation d’un minimum de chaleur renouvelable dans les bâtiments neufs en 2020.

Engagements de l’armée, de la SNCF, de Total, à libérer des surfaces pour le photovoltaïque

Les engagements les plus forts de ce plan sont venus de l’armée, des enseignes de grande distribution et de la SNCF, promettant de mettre à disposition des surfaces conséquentes pour l’installation de panneaux photovoltaïques.

L’armée a ainsi promis de convertir 2 000 hectares de friches militaires ou de toits à l’électricité photovoltaïque. Dans le même ordre d’idée, la SNCF, après avoir démarré la construction de sa première centrale solaire en Normandie fin 2017, s’est engagée à développer des projets solaires sur ses friches ferroviaires et d’installer des panneaux sur certains de ses toits. Total a annoncé qu’il avait commencé à installer des panneaux sur l’ensemble de ses stations-services et friches industrielles.

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La grande distribution convertie au solaire ?

Les principales enseignes de grande distribution présentes en France (Leclerc, Système U, Carrefour, Les Mousquetaires et Auchan) se sont elles aussi engagés, à des degrés divers, à installer des panneaux photovoltaïques sur les toits et sur les parking : « [C’est] une activité faite pour l’autoconsommation : elle consomme l’essentiel de son électricité quand le soleil est haut », note le gouvernement – d’autant qu’une des caractéristique d’une grande surface, toit et parking, est de manquer cruellement d’ombre, une aubaine pour profiter de l’énergie du soleil.

Ces promesses sont le fruit de rencontres bilatérales, et non d’une législation contraignante. Le gouvernement a préféré le dialogue et compter sur la bonne volonté d’enseignes qui ont tout à gagner à produire leur propre électricité : « Ces résultats sont le fruit de rencontres répétées avec les acteurs qu’il a fallu convaincre de s’engager volontairement plutôt que d’attendre des normes obligatoires » note Sébastien Lecornu.

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Parallèlement à l’ensemble de ces mesures, l’Etat va mettre en place des labels « Ville Solaire » et « Département solaire » pour valoriser les collectivités qui s’engageront sur une surface minimale de photovoltaïque par habitant, avec à la clé des avantages fiscaux.

Des bonnes mesures, mais insuffisantes compte tenu des objectifs et de l’urgence climatique

Et si personne ne critique ces mesures en elles-mêmes, qui toutes vont dans le bon sens, beaucoup de spécialistes du secteur regrettent leur absence d’envergure et d’ambition. Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), regrette notamment que le gouvernement n’ait pas eu le courage de proposer des mesures à même de « révolutionner le marché ».

Les professionnels de la filière solaire espéraient le lancement d’appels d’offres pour des fermes solaires de très grande envergures, qui marquerait une rupture avec la politique française centrée sur les petites et moyennes centrales – et semble indispensable pour atteindre les objectifs français en la matière.

La France doit atteindre entre 18 et 20 GW de puissance solaire installée en 2023, contre 8 GW aujourd’hui – soit environ 2 GW en moyenne par an, quand moins de 1 GW a été installé en 2017 et un maximum de 1,5 GW pour 2018.

On attend quoi ?

« Il sera difficile d’atteindre nos objectifs uniquement avec cela », jugeait un spécialiste de la filière après l’annonce du plan. Il reste à espérer que la future PPE fixe des objectifs suffisamment élevés pour enfin « réveiller » les autorités françaises et lancer une vraie politique de grands travaux solaires dans le pays.

Le potentiel est là, les technologies sont matures et rentables, l’urgence climatique pousse à accélérer le mouvement. Alors, comme dirait l’autre, on attend quoi ?

 

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