Face à un triple défi, énergétique, environnemental et sociétal, le Sri Lanka veut développer l’électricité renouvelable, à la fois pour réduire le coût de son énergie, améliorer l’accès à l’électricité et limiter ses émissions de gaz à effet de serre. Le pays vient, pour ce faire, de lancer un large plan de déploiement des smart grids, soutenu notamment par la France. Présentation.

Le secteur de l’électricité est en train d’atteindre, au Sri Lanka, sa maturité. Alors que seul 25% du pays était électrifié en 1985, ce chiffre dépasse aujourd’hui les 90%. Mais le pays est déterminé à moderniser l’ensemble de son réseau électrique, à la fois pour accueillir plus de renouvelables intermittents (éolien et photovoltaïque), réduire ses coûts de production de l’électricité et sécuriser l’approvisionnement énergétique de la population.

Hydro-électricité, première source historique du pays

Historiquement, la première source d’électricité du Sri Lanka est l’hydro-électricité : le pays a très tôt valorisé son potentiel en la matière, et, avec 1 745 MW installés en 2017, les dix grandes centrales hydrauliques restent numéro 1 du pays en terme de puissance disponible.

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Pour autant, le Sri Lanka ne dispose plus de réserve en la matière, hors de la petite hydroélectricité qui reste sous-valorisée. Comme, dans le même temps, les besoins en électricité ont continué de croître fortement, le pays a commencé, à l’orée des années 2010, à diversifier un mix électrique jusqu’ici partagé entre le pétrole et l’hydraulique.

Depuis 10 ans, le recours au charbon a explosé

Les centrales au charbon, absentes du pays jusqu’en 2010, se sont ainsi largement développées depuis, pour devenir en 2017 la source numéro 1 du pays en terme de production électrique, avec 5 103 GwH (34,8%), contre 5 045 GwH pour le pétrole (34,4%) et 4 004 GwH pour l’hydro-électricité (27,3%), qui paye par des rendements médiocres des années successives de faibles précipitations.

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Cela a eu pour effet d’augmenter fortement les émissions de gaz à effet de serre du secteur électrique, tout comme le prix de l’électricité, qui reste particulièrement élevé, à 0,8 $ le kWh, contre 0,4 $ le kWh en Chine par exemple.

Le solaire : une histoire ancienne pour le Sri Lanka

Mais, dans le même temps, le pays a commencé à valoriser à grande échelle son potentiel important en nouvelles énergies renouvelables (EnR), notamment le photovoltaïque et l’éolien.

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L’histoire du pays avec le photovoltaïque est ancienne : dès le millieu des années 1980, la société Suntec, fondée par trois entrepreneurs canadiens d’origine sri-lankaise, Lalith Gunaratne, Viren Perera et Pradip Jayewardene, sillonnait les campagnes du pays pour proposer leurs panneaux solaires.

Même si les rendements étaient plus bas et les prix plus élevés qu’aujourd’hui, de nombreux villages se sont équipés, familiarisant le pays avec cette technologie : « Les villageois nous ont traités comme des dieux, même si le député local était en colère parce que cela nuisait à sa campagne électorale promettant l’électricité pour tous », raconte Lalith Gunaratne. Revendue à Shell, Suntec reste un acteur majeur du photovoltaïque sri-lankais. Pour autant, jusqu’en 2008, une seule centrale photovoltaïque, de 1,2 MW, était raccordée au réseau électrique national.

Développer les EnR le plus largement possible

C’est à cette date que le pays a commencé à amorcer sa transition énergétique, en démarrant ses investissements dans les EnR, qui n’ont cessé de croître depuis. De 3MW de nouvelles EnR (donc hors hydraulique) installées en 2008, le pays est passé à 90 MW en 2012 et 208 MW en 2017. Sur cette dernière année, ces EnR ont produit 519 GwH, soit déjà 3,5% de la production électrique du pays.

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Cette part est amenée à fortement augmenter dans les années à venir, car le pays a en effet décidé d’investir largement dans ces énergies. En parallèle le Sri-Lanka a amorcé une indispensable modernisation de son réseau électrique, s’appuyant notamment sur des technologies smart grids. La baisse spectaculaire des coûts de l’éolien et du photovoltaïque font espérer au ministre d’État chargé de l’énergie et des énergies renouvelables, Ajith P. Perera, une réduction du coût de l’électricité de 0,8 à 0,5 $ par kWh.

60 millions de compteurs intelligents à déployer

Pour augmenter la part des renouvelables dans son mix électrique, mais surtout pour sécuriser son approvisionnement et éviter tout gaspillage, le pays a lancé l’année dernière un vaste « Programme d’investissement pour le développement de l’énergie verte et l’amélioration de l’efficacité énergétique ».

Ce programme s’appuie sur trois objectifs principaux : moderniser les infrastructures de transport, s’équiper en compteurs intelligents et en plateformes smart grids : «La feuille de route pour le concept de réseau intelligent a été approuvée par le Cabinet des ministres la semaine dernière et le processus devrait être achevé dans les cinq prochaines années. Le Sri Lanka aura besoin de 60 millions de compteurs intelligents » a déclaré Ajith P. Perera fin 2017.

La France soutient le Sri-Lanka dans son plan smart grid

Le coût total de ce projet, qui sera piloté par le Ceylon Electricity Board (CEB), l’énergéticien public du Sri Lanka, est estimé à 228 millions d’euros. La Banque Asiatique de Développement a déjà fourni au CEB un prêt de 131 millions d’euros pour financer une partie des coûts.

La France est également au premier rang pour soutenir ce projet de développement : l’Agence Française pour le Développement va verser au CEB 30,3 millions, dont 22 millions ont déjà été débloqués pour mener la première tranche de ce projet.

Le 17 octobre 2018 RHS Samaratunga, secrétaire du ministère des Finances et des Moyens de communication au nom du gouvernement du Sri Lanka, et Martin Parent, directeur local de l’AFD, ont signé un accord de facilité de crédit au ministère des Finances et de la Communication, à Ceylan.

Une plateforme de pilotage est déjà opérationnelle

Le ministre de l’énergie a par ailleurs déjà anticipé la mutation que cette révolution allait engendrer dans le secteur public de l’électricité, notamment en terme d’emploi : « Les services techniques s’occupant de relever les compteurs seront superflu à l’avenir : nous allons former ces équipes à fournir des services liés aux relations avec la clientèle pour qu’ils conservent leurs emplois » précise Ajith P. Perera.

Au niveau des réalisations concrètes, une plateforme de pilotage smart grid dernier cri a déjà été installée à Battaramiulla, pour un coût de 3 milliards de roupies sri-lankaises (15,3 millions d’euros), et les premiers compteurs devraient être installés cet automne.

Le pays vise les 100% d’électrification à moyen terme, avec un réseau sûr, fiable, et de plus en plus décarboné. Une belle ambition, à laquelle la France peut être fière de contribuer.

 

 

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