Alors que le déploiement des compteurs intelligents doit débuter d’ici la fin de l’année, les administrations en charge du projet peinent à trouver un accord sur les modalités de récolte des informations recueillies par Linky. 

Pour la CNIL, la propriété intellectuelle des données avant tout ?

L’installation des nouveaux compteurs intelligents est imminente et suscite encore son lot d’interrogations auprès du grand public, que cela soit au sujet du fonctionnement de ces « smart meters » ou de leur objectif. Une des plus persistantes reste le mode opératoire concernant la relève de la consommation électrique des abonnés, appelée la courbe de charge, effectuée par le boitier communiquant.

Si la collecte des informations interpelle les Français, elle occupe également le débat au sein des instances encadrant le développement de Linky. En cause, le pouvoir accordé au consommateur dans le processus de récupération des données.

La Direction générale de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), toutes deux en charge de la protection du consommateur, semblent vouloir laisser au consommateur la possibilité d’autoriser ou non la récolte des données au moment de l’installation du compteur. La courbe de charge d’un consommateur par un tiers serait alors collectée avec l’accord express de l’abonné. 

« Dans ce cas, la collecte se fait postérieurement à l’obtention de l’accord (le mieux étant que le consommateur puisse activer lui-même la collecte de sa courbe de charge) », précise la Commission. Une position que s’apprête à mettre en oeuvre ERDF, développeur des compteurs intelligents Linky. En effet, ceux-ci ont été conçus pour le cas où un accord express du consommateur est donné avant de procéder à la relève des boitiers. Un mécanisme en phase avec la notion de respect de la propriété intellectuelle des consommateurs.

Notons que la CNIL semble récemment avoir fait évoluer son jugement, puisque dans un avis en date du 30 novembre, elle plaide pour un enregistrement des données par défaut, sans toutefois que ces données soient transmises à des tiers, et en laissant la possibilité à l’usager de s’opposer au « déclenchement de ce stockage ». Difficile de savoir où elle veut vraiment en venir : si le stockage est effectué par défaut, comment l’usager pourrait s’opposer à son « déclenchement » ?

Un enregistrement par défaut pour le ministère de l’Écologie

Contrairement à ceux qui veulent continuer à mettre le consommateur au cœur de la décision, la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) prône une toute autre manière de faire. L’institution penche davantage vers un processus de collecte par défaut, moins restrictif. Au consommateur ensuite de manifester sa volonté de ne pas bénéficier du service auprès des gestionnaires de réseau.

Le ministère de l’Écologie, dont dépend cette Direction, estime que cette démarche devrait permettre de faciliter la transition énergétique. Seulement, en plus de poser la question de respect de la propriété intellectuelle, ce mode opératoire risque de soulever beaucoup de questions chez les clients : A qui s’adresser pour s’opposer ? Comment la CNIL va-t-elle surveiller que l’opposition est bien prise en compte ? L’opposition est elle définitive ? L’opposition est elle nominative ou liée à une adresse ?

Critique sur le plan éthique, brouillon sur le plan pratique, l’option pourrait en outre s’avérer périlleuse à l’aune du déploiement des 35 millions de compteurs conçus, on l’a vu, avec les exigences de protection du consommateur. Le contribuable est en droit de se demander combien cette décision politique va lui coûter et lui rapporter.

3 millions d’unités ont commencé à trouver le chemin des foyers français le 1er décembre dernier, pour un déploiement total qui devrait se terminer en 2021. Dans ce projet où le consommateur devient un véritable partenaire de la transition énergétique, il est encore difficile de définir la façon dont l’abonné va influencer l’action portée par Linky.  Si deux directions se profilent, il faudra opter pour une solution qui réponde à la fois à des problématiques techniques, économiques et environnementales, tout en respectant les libertés des Français. 

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