Lancée depuis plusieurs années dans le déploiement d’outils intelligents, la ville de Luxembourg, cosmopolite et ouverte au monde, entend devenir une smart city exemplaire. Au menu : mobilité, logement, environnement, sécurité, éducation. Le projet est plus que convaincant sur le papier, les premiers pas des réussites, mais le ville n’a pas encore démarré ses réalisations les plus cruciales. Excès de prudence ou lenteur des décideurs ?

La ville de Luxembourg s’est doté depuis plusieurs années d’une stratégie smart city raisonnée, pour enclencher sa révolution numérique. Ses réalisations semblent modestes, en comparaison avec d’autres capitales européennes – et même d’autres villes de taille équivalente. Mais les autorités mettent en avant une démarche cohérente et toujours pragmatique, visant une utilité réelle pour les services municipaux ou les habitants.

«  Pour que les  citoyens les utilisent, encore faut-il qu’elles leur simplifient la vie »

Car c’est bien là l’obsession des autorités de la ville : ne pas générer des outils et des données pour le plaisir – rester utile : « Nous avons développé plusieurs applications très performantes ces dernières années. Pour que les  citoyens et les visiteurs les utilisent, encore faut-il qu’ils y trouvent un intérêt et qu’elles leur simplifient la vie. A ce niveau, les différents services de la Ville de Luxembourg collaborent afin d’améliorer constamment les outils mis à disposition des utilisateurs » déclare ainsi Patrick Goldschmidt, échevin chargé de la mobilité en ville, de l’environnement et de l’intégration des personnes à besoins spécifiques.

Car la ville de Luxembourg est une capitale internationale et multiculturelle, avec près de 70% d’étrangers parmi ses 110 000 habitants, et 160 nationalités représentées. Elle reste, à l’échelle de l’Europe, une ville moyenne, et son retard s’explique aussi par des moyens et des équipes moins fournies que les autres capitales européennes.

Luxembourg a scindé sa démarche smart city en six grands chantiers, dont les réalisations progressent conjointement sur les deux grands axes d’une ville intelligente – d’une part la collecte et le traitement des données, d’autre part la création d’interfaces et d’applications pour échanger avec la population.

Une amélioration de la connectivité, en attendant plus de capteurs

Le premier chantier est celui des infrastructures. En la matière, la priorité de Luxembourg était de déployer un réseau WiFi de haute qualité, pour assurer une connectivité optimale dans l’ensemble du territoire. Une réussite incontestable : « Peu de capitales européennes peuvent aujourd’hui se targuer de disposer d’un réseau Wi-Fi avec la même densité d’antennes et la même qualité de réception globale que le nôtre » pointe Patrick Goldschmidt.

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Parallèlement à ce réseau WiFi, la ville s’est doté d’un réseau de 150 kilomètres de fibres optiques dédiées à la municipalité, reliant les différents bâtiments de l’administration communale, assurant une transmission efficace et rapide des données entre les différents service. La municipalité a également investi dans des serveurs et des data centers, et a engagé une équipe d’informaticiens et développeurs pour créer et gérer plateformes et applications.

La ville envisage ensuite de s’équiper de capteurs, notamment pour la mobilité et l’environnement, afin de basculer dans une agrégation de données à grande échelle.

Rendre la population plus smart et développer une gouvernance citoyenne

Le second chantier concerne la population : la ville veut améliorer l’accès à l’éducation et à l’enseignement de ses habitants, tout en augmentant leur maîtrise des nouvelles technologies. Parallèlement, la smart city permet de simplifier et de dynamiser la vie associative locale par des plateformes dédiées, et d’ainsi promouvoir la pluralité ethnique et l’ouverture d’esprit.

Troisième chantier, complémentaire du second : Luxembourg veut intégrer sa population dans sa gouvernance. La réalisation la plus emblématique est une participation des citoyens en ligne aux discussions budgétaires, mais la ville de Luxembourg a également mis en place un partage des données publiques, un suivi des démarches administratives en ligne (notamment les permis de construire), ainsi qu’une dématérialisation de plusieurs services publics, une retransmission du conseil municipal en streaming live, ou une application de signalement des éléments publics détériorés.

Convaincante sur la mobilité, pleine de projets pour l’environnement

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Le quatrième chantier est celui de la mobilité : la ville a développé à destination de ses habitants une application performante, City App. Elle « entend répondre à des enjeux de mobilité à l’échelle de la ville, en proposant une information actualisée en temps réel sur la localisation et l’offre des parkings, l’offre en transport en commun, ou encore en vélo, etc. Grâce à cette application, je peux connaître l’heure de mon prochain bus, acheter un ticket en ligne, connaître la disponibilité des Vel’oh! en fonction de mon emplacement » précise Patrick Goldschmidt.

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La ville, comme l’ensemble du Grand-Duché d’ailleurs, entend par ailleurs favoriser la mobilité électrique par un déploiement de bornes de recharge.

Cinquième chantier, celui de l’environnement. Sur ce point, la ville entend s’associer pleinement aux citoyens, notamment par un cadastre solaire : « L’habitant peut par exemple découvrir si son toit est suffisamment bien orienté pour y placer des panneaux solaires » avance Patrick Goldschmidt. La ville propose un relevé mensuel de la qualité de l’air, et envisage des capteurs pour le proposer en temps réel.

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Autres projets d’importance, qui permettront, une fois mis en place, de rendre la ville réellement intelligente : un réseau d’eau intelligent, une gestion intelligente de l’éclairage public et la transformation des bâtiments municipaux en smart buildings. Encore en cours d’analyse, ils sont la marche décisive que doit franchir la ville si elle veut dépasser le B.A. BA de la ville intelligente.

De belles réalisations, mais une phase 2 qui tarde à se déployer

Le sixième et dernier chantier est celui de la qualité de vie. Les ambitions de la ville sont, là aussi, très hautes, puisque Luxembourg entend utiliser les technologies numériques pour améliorer la qualité du logement, garantir une grande sécurité individuelle et offrir des structures éducatives, des facilités culturelles et des attractivités touristiques. Ces ambitions se doublent de deux projets en phase de test, pour valoriser la ville en réalité virtuelle et en réalité augmentée.

Au final, la ville de Luxembourg a choisi d’avancer progressivement. Les réalisations actuelles (connectivité, gouvernance citoyenne, applications de service public) sont à saluer. Mais la ville reste très en retard sur une majorité de capitales européennes, notamment en terme d’installation de capteurs à grande échelle, ou de traitement intelligent des réseaux de fluide, de l’éclairage public ou des bâtiments.

On ne peut reprocher à la ville de Luxembourg de ne pas s’être jeté la tête la première dans une course au smart, mais, maintenant que les bases semblent bien en place, il faudrait que la municipalité enclenche, rapidement, la phase 2 de son projet – faute d’accuser rapidement un retard conséquent sur le reste de l’Europe.

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