Le stockage stationnaire de l’électricité est un des enjeux clés de la transition énergétique mondiale et, avec elle, de l’avenir de la planète. Partout dans le monde, des équipes de scientifiques cherchent à améliorer les procédés existants ou à en inventer de nouveaux. Gros plan, aujourd’hui, sur les nouvelles potentialités de la pile à combustible et sur les capacités de stockage des métaux fondus.

Les technologies pour stocker de l’électricité continuent d’agiter les chercheurs du monde entier. Les réseaux électriques ne pourront se passer de solutions de stockage de grande capacité s’ils veulent accueillir une part importante de renouvelables intermittents. Les techniques actuellement matures présentent toutes des défauts, ce qui explique l’effervescence sur ce créneau de recherche. Nous faisons régulièrement le point sur les méthodes émergentes.

La pile à combustible : comment améliorer son rendement ?

Aux Etats-Unis, une équipe de la Colorado School of Mines s’est ainsi penché sur les moyens d’améliorer la pile à combustible. Cette méthode de stockage consiste à utiliser de l’électricité pour produire, à partir d’eau, de l’hydrogène sous pression ; pour décharger la batterie, il suffit de combiner cet hydrogène avec l’oxygène de l’air pour produire de l’électricité et de la vapeur d’eau.

stockage electricite recherche mondiale - Les Smart Grids

Cette technologie est connue et utilisée depuis des années. Elle est notamment à la base des véhicules dits « à hydrogène », car elle permet de délivrer une grande puissance électrique avec peu de « carburant » (de l’hydrogène compressé).

Des chercheurs de la Colorado School of Mines ont récemment voulu optimiser la pile à combustible pour le stockage d’électricité de grande capacité. Le but ? Trouver les conditions dans lesquelles le rendement de la pile est le meilleur. Car le défaut numéro 1 de la pile à combustible, pour un tel usage, est la faiblesse de son efficacité énergétique.

Monter en température pour optimiser le stockage de la pile à hydrogène

Ils viennent de rendre publiques leurs premières conclusions. Elles sont encourageantes : oui, la pile à combustible peut offrir des rendements exceptionnels. Il faut pour cela qu’elle soit portée à très haute température. Aux alentours de 500°C, l’efficacité du procédé atteint 75%, un chiffre hors norme pour une telle capacité. Mieux : après 1 200 cycles, aucune dégradation n’était à déplorer.

Il reste maintenant aux chercheurs à définir si cette très haute température peut être compatible avec un développement industriel économiquement viable. Ce qui est certain, c’est que, à cause de la lourdeur du dispositif nécessaire pour maintenir la pile à combustible à cette chaleur durant sa charge et sa décharge, ces « super-piles à combustible » ne pourront être utilisées qu’à grande échelle et dans des grandes capacités de stockage.

AMADEUS : stocker l’électricité dans des métaux en fusion

Restons dans les hautes températures, mais changeons d’éléments : de l’hydrogène et l’oxygène, passons aux métaux. Venus d’Espagne, de Norvège, d’Italie, de Pologne, d’Allemagne, de Grèce, des chercheurs travaillent sur un projet européen d’envergure, nommé AMADEUS. Le principe général de ce projet est d’utiliser de l’énergie pour porter des métaux ou des alliages métalliques à de très hautes températures (environ 1 700°C) pour les faire fondre, puis les conserver dans un contenant isolant et résistant à la chaleur. Cette chaleur peur ensuite être restituée sous forme d’électricité, en fonction des besoins.

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« On peut stocker à peu près entre 1 et 2 kilowattheures par litre de métal liquide. C’est environ 10 fois la capacité de stockage d’une batterie électrochimique conventionnelle. Toute cette énergie que l’on produit lors du processus de fusion, on ne la gaspille pas : c’est une énergie que l’on stocke sous forme de chaleur » explique Alejandro Datas, coordinateur du projet AMADEUS.

AMADEUS : « stocker beaucoup d’énergie dans de très faibles volumes »

Deux pôles de recherche pratique ont été mis en place pour trouver l’alliage idéal et le meilleur moyen de le valoriser. Le premier se situe à Trondheim, la troisième ville de Norvège, au centre du pays.

Dans ce laboratoire de fonderie, les chercheurs portent différents métaux à des températures atteignant jusqu’à 2 000 °C : « Nous avons commencé avec les matériaux qui ont un potentiel d’énergie très différent selon qu’ils sont à l’état liquide ou solide et c’est ce type d’effet que nous cherchons principalement. C’est très important parce que cela nous permet de stocker beaucoup d’énergie dans de très faibles volumes, » détaille Merete Tangstad, spécialiste des matériaux à l’Université norvégienne de sciences et de technologie (NTNU)« .

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Chercher l’alliage parfait

L’équipe de chercheurs est donc en quête du meilleur alliage, celui dont la fusion est la plus performante, fiable et sûre. Le but est de déterminer le métal offrant le meilleur rendement, dans des conditions de sécurité optimales, et avec le contenant adéquat. Ce dernier point est capital, car c’est celui qui, en cas de défaillance, pourrait provoquer le plus d’accidents.

« Quand les températures sont élevées, tout réagit avec tout et chacune de ces réactions peut causer d’énormes changements au niveau des caractéristiques du contenant : il peut même se fissurer. On cherche donc à avoir les conditions adéquates qui permettent des réactions chimiques contrôlées lors du processus de fusion » précise Natalia Sobczak, experte en sciences des matériaux à l’Institut polonais de recherche métallurgique (FRI).

Bientôt un prototype, bientôt des tests à échelle réelle

Le second pôle de recherche est situé à Madrid, et utilise les alliages et contenants proposé par l’équipe norvégienne pour créer les premiers systèmes de stockage d’énergie opérationnels. L’idée est d’utiliser un minimum de composants, pour réduire les temps de construction et d’installation, et de limiter les coûts de maintenance.

Un premier prototype est déjà opérationnel et sera prochainement relié à un système de production d’électricité renouvelable. L’étape suivante sera de l’installer dans un immeuble ou un quartier pour le tester à échelle réelle. En cas de succès, une commercialisation pourrait être envisagée à moyen terme.

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Une commercialisation dans les 5 ans ?

Pour ce faire, l’équipe d’AMADEUS vise des systèmes de taille réduites, modulables et duplicables : « Élaborer des systèmes de petite taille, cela nous donne l’avantage de pouvoir vendre de nombreuses unités, d’augmenter la production et d’améliorer significativement notre savoir-faire. Ce qui devrait nous permettre à court terme, disons dans les cinq ans à venir, de mettre cette nouvelle technologie sur le marché, » conclue Alejandro Datas.

Cette ébullition de recherche est, en tous les cas, une excellente nouvelle pour l’avenir des réseaux électriques. Et, qui sait, peut-être que ces piles à combustibles à haute température ou ces métaux en fusion deviendront des composantes clés du système énergétique mondial.

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