Après avoir présenté un état des lieux de la filière solaire thermodynamique, une technologie encore peu développée mais au potentiel immense, place à quelques projets d’envergure, emblématiques de l’importance que cette source d’énergie renouvelable pourrait prendre dans les années à venir.

Encore très peu développé, surtout par comparaison avec un photovoltaïque en pleine explosion, l’énergie solaire thermodynamique présente de grands atouts :  dans la première partie de notre étude, nous avons évoqué, notamment, la possibilité de créer des centrales de très grandes capacités avec une technique de stockage associée, particulièrement dans les zones du monde où l’ensoleillement est le plus fort.

La volonté mondiale d’accélérer la transition énergétique, sensible depuis l’accord de Paris, a redonné une grande vigueur à cette technologie : si seules une cinquantaine de centrales sont actives dans le monde, les projets ou constructions en cours pourraient doubler ou tripler en quelques années la puissance électrique installée.

Sandstone, aux Etats-Unis, un mastodonte de 2 000 MW !

Parmi ces projets, certains sont particulièrement marquants, ou emblématiques d’un intérêt accru pour cette énergie renouvelable. Emblématique, la centrale Sandstone Energy 10X le sera assurément, dès qu’elle sera achevée, a priori en 2021. Située dans le désert du Nevada, construite par la compagnie californienne SolarReserve, cette centrale sera, de très loin, la plus grande du monde.

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La plus grande centrale thermodynamique actuellement en service est celle d’Ivanpah, en Californie, avec 377 MW. Les projets dépassant les 300 MW sont assez nombreux actuellement, notamment au Maroc, avec les trois prochaines tranches de la centrale solaire Noor (respectivement 380, 400 et 400 MW), ou au Chili, avec les deux parties de la centrales de Maria Elena (360 et 400 MW).

Mais Sandstone aura une toute autre ampleur : avec 10 tours solaires, 100 000 héliostats (ces miroirs suivant la course du soleil), 5 milliards de dollars de budget, elle devrait atteindre la puissance de 2 000 MW – soit 5 fois plus que la seconde plus grande centrale actuellement en projet ! Ce mastodonte disposera d’un stockage d’énergie thermiques par des réservoirs de sel fondu, et la compagnie affirme que l’électricité produite le sera au prix du marché.

En Israël, la plus grande tour solaire du monde est bientôt achevée

Gigantisme toujours, le consortium Megalim achève, en Israël, dans le désert du Negev, près de Beer-Sheva, à 150 kilomètres au sud de Tel-Aviv, ce qui sera, à sa mise en service mi-2018, la plus grande tour solaire du monde.

Le complexe d’Ashalim sera composé d’un parterre de 300 hectares (soit 400 terrains de football) composé de 50 600 héliostats, cumulant une surface reflexive de 1 millions de mètres carrés, et d’une tour immense, de 250 mètres de haut, soit 80 étages, visible à des kilomètres à la ronde.

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Les héliostats d’Ashalin sont, de plus, intelligents. Pour suivre la course du soleil, ils disposent de deux moteurs alimentés par une batterie lithium-ion, qui les rend autonomes ; ils sont reliés entre eux par un réseau Wi-Fi ultra-puissant, où des algorithmes sophistiqués agencent le ballet de ces tournesols réfléchissants.

« En supprimant les câbles entre chaque appareil, nous avons facilité l’installation sur la totalité des 300 hectares du champ, tout en faisant baisser les coûts et en rendant l’entretien de l’ensemble plus aisé », explique Eran Gartner, le directeur de Megalim.

Volonté politique d’amorcer fortement la transition énergétique

La centrale devrait disposer d’une puissance de 121 MW, et produira environ 320 GWh par an, à un coût élevé, mais assumé par les autorités israéliennes : « L’électricité fournie par une tour solaire reste 2 fois, voire 3 fois, plus chère que celle provenant d’une centrale à charbon ou au pétrole, mais cette technologie est un choix politique pour démarrer la transition énergétique », affirme Eran Gartner.

Israël s’est en effet engagé à atteindre les 10% d’énergies renouvelables dans son mix électrique en 2020, puis 17% en 2030 – alors que les EnR ne représentent aujourd’hui que 2% de l’électricité israélienne. Le gouvernement a ainsi promis d’acheter l’électricité produite par Ashalin au-dessus du prix du marché pendant 25 ans – de quoi, pour le consortium, rembourser les 500 millions d’euros de budget investis.

La France, peu de réalisations mais à la pointe de la technologie

Coté français, Alba Nova, située à Ghisonaccia, en Corse, aurait dû être la première centrale solaire thermodynamique de grande ampleur, mais la faillite de l’entreprise devant la construire a stoppé net le projet.

Si la France ne dispose pas des ressources en ensoleillement pour se projeter comme futur géant du solaire thermodynamique, elle est un pays pilote de cette technologie, avec l’une des premières tours solaires au monde, THEMIS, dans les Pyrénées-Orientales : elle a produit de l’électricité entre 1983 et 1986, avant d’être arrêté, faute de rentabilité. Elle a été réhabilité en 2004 pour en faire un centre de recherche et de développement consacré à l’énergie solaire.

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THEMIS était situé en Cerdagne, l’un des lieux les plus ensoleillé de France métropolitaine, grâce à des conditions météorologiques spéciales : climat sec, altitude assez élevée et éloignement des centres urbains permettent une atmosphère particulièrement claire une grande partie de l’année. C’est dans cette même région que SUNCNIM (la filiale de CNIM dédiée aux énergies solaires) achève eLLO, qui sera bien, à sa mise en service courant 2018, la première centrale thermodynamique de France.

eLLO, la première centrale solaire thermodynamique de France

L’échelle est sans commune mesure avec les projets géants du Chili, du Maroc, des Etats-Unis ou même d’Israël : il s’agira d’une centrale de 9 MW utilisant la technologie des miroirs Fresnel linéaire. 153 000 mètres carré de miroirs suivent la course du soleil pour chauffer des longs tubes fixes, produisant ensuite de la vapeur d’eau.

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Le système de stockage d’eLLO est constitué de neuf ballons permettant de conserver cette vapeur sous pression pendant de longues périodes. Le stockage correspond à 4 heures de production en fort ensoleillement. Ainsi la centrale pourra adapter sa production d’électricité en fonction des besoins du réseau, et pas uniquement quand la météo est favorable.

Les grands travaux ont commencé

2018 devrait également voir la mise en service des premières centrales de grande ampleur dans de nombreux pays, la Chine avec la centrale de Golmud, une tour solaire de 200 MW, le Chili, avec la tour d’Atacama, pour 110 MW, ou l’Afrique du Sud, avec la centrale à miroirs cylindo-paraboliques de Kathu (100 MW).

Les grands travaux ont démarrés, une filière va progressivement se mettre en place au niveau mondial: de quoi réaliser le scénario de l’AIE, et offrir dans 30 ans plus de 10% de l’électricité mondiale ?

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