Aux Etats-Unis, l’archipel d’Hawaï fait figure de précurseur et de chef de file en matière de développement des énergies renouvelables et de lutte contre le réchauffement climatique. Mobilité propre, solaire, éolien, mais aussi géothermie et énergies marines, Hawaï entend valoriser l’ensemble de ses ressources, et, pour sécuriser l’approvisionnement électrique, investit massivement dans les solutions de stockage.

Archipel situé au cœur du Pacifique, l’Etat Hawaï est en première ligne pour faire face aux effets du changement climatique, et les responsables politiques locaux ne veulent pas rester inactif devant ce danger. Ils souhaitent faire d’Hawaï un exemple, qui prouve au monde entier – et notamment au reste des Etats-Unis – qu’une politique énergétique ambitieuse en terme de renouvelables est viable : « On le ressent directement d’autant plus que nous sommes sur une petite île. Ils remarquent les changements de température. Il fait bien plus lourd. Nous sommes directement exposés à ce phénomène, nous ne pouvons le nier » note Scott Glenn, dirigeant du bureau environnemental de l’Etat.

hawai-neutralite-carbone-2045-stockage-electricite

 « Nous sommes à l’avant-garde des impacts sur le changement climatique »

Dès 2015, l’Etat d’Hawaï avait voté une loi prévoyant de couvrir 100% des besoins énergétiques de l’île par des renouvelables dès 2045 – l’importation de combustibles fossiles coûtant très cher à l’archipel, la mesure est à la fois écologique et économique. Logiquement, quand Donald Trump a claqué la porte de l’accord de Paris, en 2017, Hawaï a voté une nouvelle loi garantissant que l’Etat conserverait ses objectifs fixés dans le cadre de l’accord.

Début juin 2018, l’Etat a encore augmenté ses ambitions, puisque le gouverneur David Ige a signé un projet de loi qui s’engage à rendre Hawaï entièrement neutre en carbone d’ici 2045.  « Nous sommes à l’avant-garde des impacts sur le changement climatique » se félicite Scott Glenn.

Convertir l’île à la mobilité propre : d’abord les transports terrestres, puis les bateaux et avions

Cette loi implique une politique ambitieuse et volontariste sur trois fronts principaux. Le premier est celui des transports, notamment terrestres : Hawaï est déterminé à tracer « une nouvelle voie qui nous éloigne de notre dépendance aux combustibles fossiles et de leurs émissions de carbone pour le transport terrestre. Les industries et les technologies s’ajusteront pour changer la façon dont nous équipons nos véhicules » expose Alan Arakawa, l’un des maires signataires de la convention.

Arakawa est persuadé, à raison, qu’une volonté politique fermement affirmée permettra à l’île de convertir l’ensemble de ses véhicules terrestres à des moyens de propulsion propres, véhicules électriques en premier chef, mais l’archipel teste aussi les véhicules à hydrogène.

Mais Hawaï voit déjà plus loin en terme de transport : l’archipel sait que la neutralité carbone ne pourra être atteinte qu’en rendant ses nombreux bateaux et avions propres. Les responsables politiques locaux sont conscients qu’aucune solution d’électrification du transport maritime ou aérienne n’est mûre : « Ce sont des réseaux de transport mondiaux qui n’ont pour l’instant pas de remplaçants » souligne Scott Glenn ; mais Hawaï veut se placer en pointe de la recherche et des expérimentations pour convertir bateaux et avions à des systèmes de propulsion propres (électricité, hydrogène, etc.).

Développer massivement les énergies renouvelables

Le second front d’action est dans le développement massif des énergies renouvelables. L’archipel a la chance de disposer d’un potentiel parmi les plus forts au monde, entre un ensoleillement fort, des vents puissants et réguliers, un sous-sol regorgeant de chaleur propre à la géothermie, et de vagues et courants marins importants et réguliers.

Dès 2009, un rapport avait démontré que chacune des îles de l’archipel avait la possibilité de produire la totalité de leur électricité avec des énergies renouvelables, à des prix concurrentiels. Quand on connaît la chute spectaculaire des coûts des renouvelables depuis 10 ans, il est évident que cette autosuffisance électrique renouvelable est réalisable à moyen terme.

hawai-neutralite-carbone-2045-stockage-electricite

Eolien et photovoltaïque comme socles, géothermie et énergies marines valorisées

L’archipel s’est lancé dans de vastes plans d’installations d’éolienne, notamment via le projet Interislandwind et ses 400 MW de champs éoliens programmés, de solaire photovoltaïque, soutenu notamment par un prix d’achat garanti et des créations de fermes solaires aux quatre coins de l’archipel, ainsi qu’une valorisation de l’électricité produite par des biocarburants.

hawai-neutralite-carbone-2045-stockage-electricite

L’Etat a également investi dans la géothermie et les énergies marines : depuis octobre 2017, l’entreprise Ocean Power Technologies a connecté au réseau un système de production d’énergie grâce aux vagues, en faisant une des premières centrales utilisant cette énergie à produire de l’électricité pour un réseau local.

Déployer le stockage électrique à grande échelle

Le troisième et dernier front est le stockage de l’électricité, qu’Hawaï développe à grande échelle, afin de sécuriser et stabiliser son réseau électrique face à l’afflux programmé d’énergies renouvelables intermittentes.

En novembre 2018, Xtreme Power va ouvrir sa quatrième ferme de batterie à Hawaï : dotée de 10MW de stockage, elle sera associée à une centrale éolienne de 21 MW. Le constructeur de batterie travaille également en collaboration avec le développeur de projets solaires Castle & Cooke, pour lequel il va ouvrir une unité de stockage de 1,125 sur l’île de Lana’i.

L’île de Kaua’i, la plus ambitieuse d’Hawaï

Mais l’île d’Hawaï où ces ambitions s’incarnent le mieux est probablement celle de Kaua’i. L’île vient de signer un nouveau PPA (Power Purchase Agreement) avec la coopération KIUC, s’appuyant sur une multiplication de projets associant panneaux photovoltaïques et unité de stockage.

hawai-neutralite-carbone-2045-stockage-electricite

En juin 2018, un parc solaire de 13MW a été inauguré, soutenu par une batterie Tesla de 52 MWh, alors que les travaux d’un deux autres fermes photovoltaïques démarraient. D’une puissance de 19,3 MW, assisté d’une batterie d’AES Distributed Energy capable de stocker 70 MWh, la première va produite une électricité vendue 0,1085 dollars (0,0931 €) le kWh. La seconde va associer 28 MW de puissance photovoltaïque à une batterie de 20 MW / 100 MWh.

Kaua’i : 90% de renouvelables dès 2023 !

L’ensemble de ces projets devraient permettre à Kaua’i d’atteindre les 70% de renouvelables dès 2019, soit 11 ans plus tôt que prévu initialement ; la construction d’une centrale STEP à partir de l’année prochaine, associée à un vaste déploiement d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques, permettra d’atteindre les 90% de renouvelables dès 2023 – qui en font l’île numéro 1 d’Hawaï en la matière, en avance sur tous les prévisionnels, et parmi les territoires les plus propres en terme énergétique au niveau mondial.

Cet exemple prouve à quel point les solutions techniques existent, que le stockage permet aujourd’hui de déployer les renouvelables à très grandes échelles, et que la volonté politique suffit à réussir une transition énergétique rapide et efficace. Puisse Hawaï servir de source d’inspiration à de nombreux autres Etats.

 

 

 

 

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.