Si la France, par l’effet de vigoureuses politiques publiques, rattrape progressivement son retard en matière d’énergies renouvelables, notamment sur l’éolien terrestre et le photovoltaïque, l’éolien offshore reste pour l’instant absent du mix énergétique français. Une étrangeté devant le potentiel conséquent de cette énergie, les littoraux français étant nombreux et venteux. Cette situation va changer, puisque chantiers, appels d’offre et projets se multiplient. Etat des lieux.

Le potentiel de l’éolien marin des eaux territoriales françaises est le second en Europe, derrière le Royaume-Uni. Pourtant, alors que des fermes éoliennes offshore se sont multipliés au large de nombreux pays d’Europe, la France n’en dispose d’aucune opérationnelle.

Le Royaume-Uni dépasse les 5 GW de puissance installée, l’Allemagne les 4GW, le Danemark, pionnier dès 1991, a franchi les 1 000 MW, de même que les Pays-Bas, alors que la Belgique atteint les 700 MW.

Une volonté récente de développer l’éolien offshore en France

L’éolien offshore présente pourtant de nombreux avantages, notamment des vents plus forts, plus fréquents et plus réguliers que sur terre, ainsi qu’un impact sur la paysage et les écosystème moindre. Il s’appuie également sur une technologie mature, à l’efficacité éprouvée, qui ne cesse de se perfectionner et gagner en gigantisme.

Pour autant les politiques publiques françaises se sont détournées de ces énergies, jusqu’à l’orée des années 2010, à l’issue du Grenelle de la mer. Depuis trois vagues d’appel d’offre se sont succédées, en 2012, 2014 et 2017, pour un total de 7 concessions, non sans susciter retard et débats. Mais la volonté étatique est bien de mettre en place une filière solide, avec une forte implantation locale.

En effet, une éolienne offshore est fixée au fond de la mer et reliée au réseau de distribution par un câble d’export d’énergie, ce qui impose des profondeurs allant de 20 à 50 mètres de fonds – soit, le plus souvent, des eaux proches des côtes, le plus souvent à moins de 15 kilomètres. L’Etat possède les eaux littorales, il est le seul habilité à proposer des concessions.

Six concessions de 500 MW sont sur les rails…

En l’occurrence, l’appel d’offre de 2012 concernait 4 parcs éoliens offshore d’environ 500 MW de puissance : ceux de Fécamp, de Courseulles-sur-Mer et de Saint-Nazarre ont été remporté par Eolien Maritime France, une société dont les actionnaires principaux sont EDF Energies Nouvelles et l’énergéticien danois spécialiste des éoliens, Dong Energy Power – associée à Alstom. Le quatrième, celui de Saint-Brieuc, sera développé par la société Ailes Marines SAS, détenue majoritairement par l’énergéticien espagnol Iberdrola et EOLE-RES SA, une entreprise d’ingénierie avignonnaise – associés à Areva.

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L’appel d’offre de 2014 concernait 2 parc éoliens de 500 MW, celui des Iles d’Yeu et de Noirmoutiers et celui du Tréport ; les deux ont été remportés par un consortium détenu à 47% par Engie, à 43% par EDP Renewable, spécialiste espagnol des éoliennes, et à 10% par la Caisse des Dépôts – associé à Areva. L’appel d’offre de mars 2017, dont le résultat sera connu en 2018, concerne une ferme éolienne de 750 MW au large de Dunkerque, cependant qu’un nouvel appel d’offre pour un projet au large de l’île d’Oléron est en préparation.

pendant qu’une filière française de l’offshore se met en place

L’un des objectifs de ces appels d’offre était de mettre sur pied une filière du offshore en France : une partie des turbines seront construites en France, au Havre, elles seront assemblées à Brest, Saint-Nazaire, Dunkerque, et leur maintenance sera assurée par des équipes situées dans des ports proches des zones d’exploitation. L’impact sur l’emploi est conséquent : pour ne prendre qu’un exemple, le projet de Dunkerque offrira 2 000 emplois dans l’usine de montage des éoliennes, et une centaine dans les postes de maintenance.

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L’intégration de cette énergie au réseau national se fera sans encombre, la RTE assurant le raccordement à très haute tension de l’ensemble des concessions, Enedis s’attachant à l’optimisation de ces sources renouvelables pour répondre aux demandes d’électricité au niveau local.

L’impact sur le paysage et la pêche en question

Pour autant des obstacles demeurent pour la plupart de ces parcs éoliens : certains habitants sont réticents devant le changement de paysage qu’induisent ces éoliennes géantes sur la ligne d’horizon ; deplus l’installation d’éolienne créé naturellement des zones d’exclusion de pêche pour les chalutiers et les senneurs, des bateaux couramment utilisés le long de nos côtes – ce qui provoque une grogne légitime des pêcheurs. Les élus locaux rejoignent parfois ces inquiétudes.

Cela étant la plupart de ces projets font de vrais efforts de pédagogie pour expliquer que l’impact sur le paysage demeure minime, et invitent les pêcheurs à un dialogue pour trouver les meilleures solutions possibles. A Noirmoutier par exemple, les décisions opérationnelles ont été prises en concertation avec les pêcheurs, qui se verront reverser une partie de la taxe sur les Mégawatt installé, soit plus de 1,5 millions d’euros destinés à moderniser les bateaux.

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Mieux, l’Etat a pris en compte ces réticences dans ses nouveaux appels d’offre, ceux de Dunkerque et de l’Île d’Oléron, en proposant un dialogue renforcé dès la mise en place du projet ; certaines lourdeurs administratives ont également été levées pour accélérer la mise en chantier des projets.

De nouveaux objectifs, ambitieux mais réalistes

La France avait pris l’engagement d’atteindre les 6 000 MW d’éolien en mer en 2020 ; la Programmation Pluriannuelle de l’Energie a revu ces ambitions à la baisse, mais table sur une puissance installée de 3 000 MW en 2023 (les six concessions des deux premiers appels d’offre), avec 6 000 MW de projets attribués.

Une feuille de route propose de fixer un objectif de 15 GW à l’horizon 2030 – là où l’Allemagne envisage les 25 GW et le Royaume-Uni les 33 GW. Le potentiel total des côtes françaises est estimé à 80 GW.

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La route est encore longue pour faire de la France une référence de cette technologie, qui ne produit aujourd’hui encore aucun mégawatt/heure. Mais la volonté publique, alliée à une compétence technique reconnue, devrait mettre en place une filière efficace, destinée à s’étendre rapidement.

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