Un rapport de l’IRENA remis en février à la Commission Européenne montre que l’Union Européenne, en terme de déploiement des énergies renouvelables, est à la croisée des chemins : poursuivre sur les politiques actuelles conduiraient à une part de renouvelable dans le mix énergétique qui ne dépasserait pas les 24% en 2030 – là où l’objectif fixé est de 27%. En revanche, une accélération franche des investissements permettrait de largement dépasser cet objectif et atteindre les 34%.

Entre 2005 et 2015, la part d’énergies renouvelables dans le mix européen est passé de 9% à 16,7% : un bel effort, mais qu’il convient de prolonger si l’Union veut atteindre les objectifs fixés par le paquet énergie climat de 2014, précisé en novembre 2016 dans le paquet « Energies propres pour tous les Européens », à savoir 27% du mix énergétique en 2030.

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L’Union Européenne : entre 24% et 34% de renouvelables en 2030…

Un rapport de l’agence internationale des énergies renouvelables (International Renewable Energy Agency, ou IRENA), rendu le 19 février 2018 au Commissaire européen Miguel Arias Cañete, souligne que l’Union Européenne n’en fait pas assez, actuellement, pour atteindre ces objectifs. Selon ses experts, sans modification des réglementations et des politiques, les énergies renouvelables ne pourront dépasser les 24% en 2030.

L’IRENA tire donc le signal d’alarme, enjoignant l’Europe de changer rapidement sa politique en faveur des EnR. Mais ce rapport contient également une bonne nouvelle : en se lançant dans un développement accéléré des énergies renouvelables (scénario nommé « REmap » par l’étude, par opposition au scénario de référence prévu par les paquets « énergie » de l’UE), parfaitement réaliste dans l’état actuel des technologies et des capacités de financement, l’Union Européenne pourrait porter la part des énergies renouvelables à 34% en 2030. Soit un gain considérable en terme d’émissions de gaz à effet de serre.

REmap : un scénario d’investissements massifs dans les renouvelables

Ce scénario escompte un développement massif de l’éolien et du photovoltaïque et, secondairement, des autres énergies renouvelables (biomasse, hydroélectricité, géothermie, solaire thermodynamique, énergies marines). A l’horizon 2030, le scénario REmap ambitionne en effet un total de 327 GW d’éolien installé (soit 97 GW de plus que le scénario « de référence ») et 272 GW de photovoltaïque (soit 87 GW de plus). Dans ce cas, la part des énergies renouvelables dans le secteur de l’électricité pourrait approcher les 50% en 2030, contre 29% en 2015.

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Ce scénario implique que les sources d’énergies intermittentes (solaire et éolien essentiellement) atteindraient 29% de la production d’électricité de l’Union en 2030, ce qui impose une modernisation des réseaux électriques afin qu’ils puissent absorber une part aussi importante d’énergies intermittentes : les investissements dans les smart grids devraient en conséquence être largement augmentés.

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Le chauffage, secteur clé de l’énergie européenne

Par secteur, l’IRENA fixe, pour le chauffage et le refroidissement (qui représentent presque la moitié de la demande d’énergie de l’Union), un objectif de 34% de renouvelables en 2030. Le scénario REmap ambitionne un déploiement massif des pompes à chaleur, ce système de chauffage-climatisation électrique particulièrement performant dans un logement bien isolé. Il envisage également une large conversion des réseaux de chaleur non-électrique vers la biomasse, qui remplacerait le charbon ou le gaz naturel comme combustible.

Du coté des transports, l’IRENA envisage que l’Union Européenne puisse atteindre, à l’horizon 2030, 16% de véhicules dit « propres », c’est à dire 100% électrique, hybrides rechargeables ou à pile à combustibles. Même dans ce cas, la part des énergies renouvelables productrice d’électricité dans le secteur plafonnerait à 3% de la consommation d’énergie totale. En revanche, un déploiement des biocarburants à très large échelle, dans une démarche industrielle de grande ampleur, pourrait faire grimper la part des renouvelables dans le secteur à 17%.

Point intéressant, également : malgré l’essor programmé de l’éolien et du photovoltaïque, la biomasse demeurerait l’énergie renouvelable numéro 1 à l’horizon 2030 du scénario REmap, couvrant à elle seule 55% de la consommation d’énergie renouvelable – contre 67% en 2010.

Ce scénario, en déployant des investissements prioritairement dans les pays les moins équipés en énergies renouvelables, permettrait également de réduire l’écart entre les Etats de l’Union Européenne – en 2015, la part de renouvelable dans le mix énergétique varie de 5 à 54% !

« Des investissements supplémentaires d’environ 368 milliards d’euros d’ici 2030 »

Basculer du scénario « de référence » vers « REmap » aurait, bien évidemment, un coût : l’IRENA estime qu’il faudrait « des investissements supplémentaires (par rapport au scénario de référence) d’environ 368 milliards d’euros d’ici 2030, soit l’équivalent d’une contribution annuelle moyenne de 0,3% du PIB de l’UE ».

Même si le chiffre paraît considérable, ces investissements seraient largement compensés par les économies qu’ils induiraient. La réduction des émissions de gaz à effet de serre produites par cet argent investi provoquerait une baisse des dépenses de santé publique et d’environnement estimé entre 52 et 133 milliards d’euros par an, auquel s’ajouterait une baisse sensible des importations de combustibles fossiles.

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Autres gains de ce scénario : il permettrait de créer de nombreux emplois et améliorerait de fait la balance commerciale européenne, il aiderait à désenclaver certaines régions rurales pauvres et à lutter contre la précarité énergétique ; il est aussi le seul choix si l’Union Européenne veut bel et bien, comme elle l’ambitionne, redevenir le leader du secteur des énergies renouvelables, devant les Etats-Unis et la Chine.

Un scénario plus que rentable, mais qui doit encore convaincre les Etats membres

Au bout du compte, comme pour les investissements dans les smart grids, la mobilité verte et tous les autres piliers de la transition énergétique, le choix d’un investissement massif dans les énergies renouvelables s’avère rentable, à tous les poins de vue – environnement, santé publique, économie, autonomie énergétique, emploi…

Reste à l’Union Européenne à convaincre des Etats toujours plus frileux (notamment ceux attachés aux énergies fossiles) que la Commission ou le Parlement, pour accélérer franchement cette révolution. Une partie qui s’annonce, malheureusement, extrêmement difficile à jouer…

 

1 COMMENTAIRE

  1. « l’Union Européenne pourrait porter la part des énergies renouvelables à 34% en 2030. Soit un gain considérable en terme d’émissions de gaz à effet de serre. »
    Toujours la même erreur. L’idéologie Verte aveugle IRENA, qui oublie l’énergie nucléaire.
    En France grâce à cette énergie utilisée pour la production d’électricité, ce secteur n’émet pas de GES.
    Vouloir arrêter (aux frais des contribuables, à raison de 4 Md€/ réacteur) des unités et construire à la place des éoliennes ou panneaux solaires, va doubler la sanction financière, augmenter la dépendance énergétique (le matériel est essentiellement chinois) et surtout augmenter les GES. Car ces énergies sont intermittentes et doivent être compensées par des énergies que l’on peut piloter : sans nucléaire c’est du gaz ou du charbon (ce que fait l’Allemagne).
    Chine, Inde, USA ne sont pas des idéologues : ils développent le nucléaire et nous vendrons ensuite cette technologie, quand nous en aurons perdu la maîtrise.
    Les hommes politiques ne sont plus soucieux de l’intérêt général, et c’est bien dommage.

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