La Haute-Cerdagne, en Occitanie, est la région pilote du solaire thermodynamique à condensation en France : après le four solaire d’Odeillo et la tour Thémis à Targasonne, la centrale de Llo sera mise en service l’année prochaine. Elle s’appuie sur des miroir Fresnel et une turbine à vapeur produisant de l’électricité. Première mondiale : cette centrale sera équipé d’un système de stockage de vapeur. Découverte.

La France est, historiquement, pionnière du solaire thermodynamique à codensation. Cette technologie a même un berceau précis dans l’Hexagone : la Cerdagne. Cette région, située entre l’Espagne et la France, dans les Pyrénées, dispose de conditions météorologiques très particulières, propices au solaire thermodynamique. Le climat y est sec, l’altitude élevée, les centre urbains éloignés : l’atmosphère y est donc claire une majeure partie de l’année, assurant le rayonnement solaire moyen le plus élevé de France métropolitaine.

Solaire thermodynamique : un potentiel mondial conséquent

Rappelons que, pour être rentable, le solaire thermodynamique, qui utilise l’énergie solaire pour vaporiser un liquide et alimenter des turbines avec la vapeur produite, nécessite de très hauts niveaux d’ensoleillement. Il est particulièrement adapté aux zones arides et / ou tropicales.

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Il permet la construction de centrales de très grande puissance, et sera sans doute un pilier de la transition énergétique mondiale. L’Agence Internationale de l’Energie estime ainsi que cette filière dispose d’un potentiel permettant d’envisager qu’elle produise 11,3% de l’électricité mondiale en 2050.

La Haute-Cerdagne, berceau du thermodynamique made in France

C’est ainsi dans la partie française de la Cerdagne, la Haute-Cerdagne, qu’a été construite la tour THEMIS, l’une des premières tours thermodynamiques au monde. Arrêtée en 1986, faute de rentabilité, elle est devenue un centre de recherche et de développement spécialisé dans l’énergie solaire. Non loin de là a été installé le célèbre four solaire d’Odeillo, ses 54 mètres de haut et ses 63 héliostats, à la pointe de la recherche à haute température par voie solaire.

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A proximité de ces deux équipements phares de la recherche française, un chantier s’achève, dans la commune de Llo. Il s’agit de la première centrale thermodynamique de France, conçue pour être à la fois fonctionnelle dans le territoire où elle est implantée, et un modèle miniature de projets de plus vaste ampleur dans des zones arides ou tropicales.

Llo : la première centrale thermodynamique de France

Démarrée en 2016, la centrale a été mise en service fin 2018, pour un budget total de 60 millions d’euros. Elle a été construite par la société ELlo, détenue majoritairement par la SUNCNIM, filiale dédiée au solaire de la CNIM (un groupe équipementier et ensemblier français de dimension internationale, actif notamment dans le domaine de l’énergie).

La centrale de Llo s’appuie sur la technologie des miroirs de Fresnel, des miroirs plan (ou semi-plan), qui suivent la course du soleil. « Les miroirs renvoient et concentrent les rayons du soleil vers un tube renfermant de l’eau pure qui, chauffée, est transformée en vapeur. Celle-ci, grâce à un système de circulation, est envoyée dans une turbine entraînant un alternateur produisant de l’électricité, connecté sur le réseau » expose Rémy Icard, chef de projet chez ELlo.

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Près de 100 000 miroirs Fresnel, pour alimenter une turbine en vapeur d’eau

La centrale déploie 95 200 miroirs sur une surface de 33 hectares, séparé en deux champs (Est et Ouest), pour une puissance de 9 MW : « Le site est divisé en 170 modules comprenant 10 rangées de 14 miroirs chacun. Chaque module est géré par un système de vérins codeurs, des trackers, qui positionnent les miroirs par rapport au soleil » précise Rémy Icard. 12 kilomètres de tubes courent entre ces miroirs, remplis d’une eau qui peut être chauffée à 286°C et transformée en vapeur à 70 bars de pression.

Cette technologie est connue et mature, déployée notamment aux Etats-Unis et dans l’Espagne voisine (dans des sites d’une puissance souvent bien plus élevée). Mais ce qui fait la spécificité technologique de cette centrale, c’est son système permettant de stocker la vapeur.

Des cuves pour stocker la vapeur, et prolonger de 4 heures le fonctionnement de la centrale

Les centrales thermodynamiques à tour fonctionnent sur le principe d’un fluide caloporteur porté à haute température, ce qui en font, naturellement, des dispositifs stockant de l’énergie. Mais dans la famille des centrales thermodynamiques chauffant des fluides dans des tubes (à laquelle appartient la centrale de Llo), ce stockage est une première mondiale.

Dans le détail, la centrale est équipée de 9 cuves de 120 m3 chacune : « Elles peuvent stocker jusqu’à 80 bars de pression, correspondant à 4 heures de fonctionnement de l’installation » précise Rémy Icard. Le soir, quand le soleil se couche, les cuves prennent le relai et continuent d’alimenter la turbine pendant 4 heures. De quoi répondre au pic de consommation du soir.

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A plein régime en hiver, une production de vapeur réduite en été

La centrale fonctionnera à plein régime en hiver. En revanche, en été, elle produirait trop de vapeur pour les capacités cumulées de la turbine et des cuves de stockage : « Nous ne pouvons donc pas stocker toute cette vapeur. On défocalise partiellement les champs et arrêtons d’en produire. Nous sommes capables de gérer notre production de vapeur uniquement en bougeant les miroirs » expose Rémy Icard.

Avant sa mise en service, la centrale de Llo est passée par plusieurs étapes-clés : « La connexion de la centrale sur le réseau 20 000V, les tests de sécurité entre le poste ENEDIS du col de la Perche et la centrale. Nous sommes autorisés à produire sur le réseau » détaille Rémy Icard. Juste avant d’être opérationnelle, la centrale a été mise sous pression pour nettoyer les tubes et les chasses-vapeur.

La centrale de Llo : « une vitrine internationale du savoir-faire français »

Cette centrale permet ainsi à la Haute-Cerdagne d’être positive en énergie : « avec la centrale de Llo, quelques fermes solaires et les barrages hydroélectriques, nous produisons plus d’énergie électrique que nous n’en consommons » explique Rémy Icard.

Mais le but principal de cette centrale est bien d’être une vitrine technologique pour convaincre de l’efficacité de cette alliance « solaire thermodynamique à Fresnel » / stockage de vapeur. « Cette technologie est destinée aux zones désertiques, comme le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord ou l’Amérique du sud. La centrale de Llo sera une vitrine internationale du savoir-faire français » conclue Rémy Icard.

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