La France continue de manquer de dynamisme dans le déploiement de ses énergies renouvelables (EnR). Non seulement les objectifs fixés par la dernière PPE demeurent relativement timides, mais ceux de la précédente n’ont pas été atteints. C’est l’un des  constats du dernier Baromètre de l’Observatoire des EnR (Observ’ER), pour l’année 2018.

Dans la foulée d’une Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE), présentée le 27 novembre 2018 et plutôt décevante pour les filières renouvelables, le dernier Baromètre de l’Observ’ER, publié le 10 janvier 2019, confirme la difficulté qu’aura la France a atteindre ses objectifs de l’Accord de Paris. En tout cas sur le front des EnR.

Les objectifs EnR de fin 2018 n’ont pas été atteints

Les objectifs de la nouvelle PPE relèvent certes légèrement l’ambition française en terme d’EnR, mais ils demeurent bien en-deçà du potentiel considérable du pays en la matière. Notamment parce qu’ils négligent presque totalement les potentialités offertes par les solutions de stockage. Pour autant, l’Observ’ER doute que ces objectifs, quoiqu’assez timides, puissent être atteints, compte tenu de la dynamique actuelle des différentes filières.

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En effet, le dernière Baromètre des EnR démontre, comme chaque année, la difficulté qu’a la France a atteindre ses objectifs. Et ne rend pas très optimiste. Certes, sur l’année 2018, environ 2,4 GW de puissance électrique renouvelable supplémentaire a été raccordée au réseau français. Mais c’est, d’une part, moins qu’en 2017 (2,76 GW). Et c’est, d’autre part, bien insuffisant pour atteindre les objectifs de la PPE de 2016 pour fin 2018. Elle tablait sur 53,05 GW de puissance renouvelable installée. La France échoue à environ 51,5 GW à la fin de l’année dernière.

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Au final, entre début octobre 2017 et fin septembre 2018, les énergies renouvelables auraient produit 108,15 TWh, couvrant ainsi 18,4% de la consommation électrique française.

Ces 2,4 GW installés reposent à 95% sur deux uniques filières, éolien et solaire photovoltaïque. Les autres peinent à s’installer dans une réelle croissance, pour des raisons diverses.

L’hydro-électricité, un surplace forcé

L’hydro-électricité représente toujours 58% de la production électrique renouvelable de France, mais elle a atteint la pleine valorisation de son potentiel en terme de grosses centrales. La filière maintient sa puissance entre 2017 et 2018. La PPE se montre d’ailleurs particulièrement peu ambitieuse à ce niveau, en tablant sur une stabilisation de la puissance hydraulique installée d’ici 2023, et une très timide augmentation d’ici 2028.

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Comme si le gouvernement ignorait le potentiel, pourtant réel, de la petite hydro-électricité. Alors qu’elle peut à merveille s’insérer dans une logique locale et compléter une offre renouvelable dominée par l’éolien et le photovoltaïque.

Les filières secondaires peinent à se développer

Concernant la méthanisation et la combustion des déchets, ces filières se développent de plus en plus. Mais leur utilisation pour produire de l’électricité demeure marginale, devant la production de chaleur et l’injection sur le réseau gazier. Leur dynamisme demeure une excellente nouvelle pour le pays, mais son impact sur le mix électrique français demeure limité.

La géothermie est à un carrefour : plusieurs acteurs d’importance menacent de se désengager, alors même que de nombreux projets devraient voir le jour dans les années à venir (pour l’heure, une seule centrale est active en France métropolitaine).

Les énergies marines sont encore loin de l’industrialisation, malgré un potentiel conséquent, et la France n’a donné aucun signe montrant qu’elle cherche à les valoriser fortement. Le solaire thermodynamique est un cas particulier : le potentiel, en France métropolitaine, demeure limité à quelques zones précises ; les efforts de recherche et les réalisations concrètes sont avant tout destinés à exporter des technologies vers des régions à l’ensoleillement plus fort et plus régulier.

L’éolien (notamment en mer) toujours en deçà de son potentiel

Le dynamisme français en terme d’EnR s’appuie donc sur l’éolien et le photovoltaïque. Concernant l’éolien, les 3 premiers trimestres de 2018 ont été très décevants, avec seulement 676 MW raccordés au réseau. En partie à cause du flou entourant l’autorité compétente pour émettre un avis sur l’évaluation environnementale des projets éoliens. En partie à cause d’« une opposition constante, animée par des groupuscules qui posent des recours pour freiner les projets dans plus de 70% des cas d’autorisation délivrée » selon Observ’ER. Et ce, alors qu’une écrasante majorité des Français ont une bonne image de l’éolien, notamment ceux vivant près des parcs…

Certes, l’année 2018 a vu la levée de plusieurs freins administratifs, comme la suppression d’un niveau de juridiction en cas de recours, rendant les arbitrages plus rapides. Mais les objectifs de la nouvelle PPE (24,6 GW d’éoliennes terrestres en France à fin 2023, entre 34,1 et 35,6 GW à fin 2028, contre 14,3 GW fin septembre 2018) imposent une accélération du rythme d’installation « pour atteindre 2 GW par an, et ce dès l’an prochain ». Dans l’état actuel des appels d’offre et des délais, cet objectif, pourtant peu ambitieux à l’échelle de la planète, semble très compliqué à tenir.

L’éolien en mer demeure d’ailleurs le parent pauvre de l’énergie française. Le potentiel est là, considérable. Les objectifs de 2018 ont été intégralement manqués : aucune éolienne marine n’est encore en service. Et les objectifs de 2023 sont inférieurs, en puissance, aux chantiers en cours. Message envoyé à la filière : la France ne croit pas en vous. Pourtant la maturité technologique existe, comme le prouvent les parcs géants installés au large des côtes allemandes, danoises ou britanniques.

Photovoltaïque : entre ambitions gouvernementales et crainte d’enlisement

Concernant les photovoltaïque, 698 MW ont été raccordés au réseau durant les trois premiers trimestres de 2018 – soit, grande première, plus que l’éolien. Le gouvernement semble d’ailleurs vouloir favoriser cette énergie pour augmenter sa part de renouvelables. Les objectifs de la dernière PPE visent en effet les 20,6 GW installés en 2023, contre 8,8 GW fin septembre 2018. Soit un rythme moyen de raccordement de plus de 2,3 GW annuel. Là où la France n’a pas dépassé les 1 GW depuis 2012…

Le gouvernement semble déterminé à libérer de nombreuses friches pour installer des parcs photovoltaïques géants, tout en valorisant largement l’autoconsommation. Mais cela suffira-t-il ? Une politique de très grands travaux semblent aujourd’hui nécessaire et réaliste. Mais derrière les effets d’annonce, peu de décisions concrètes ont déjà été prises. De quoi craindre un nouvel enlisement.

Manque de volonté politique

Le tableau est donc, au final, toujours en demi-teinte. Certes, les EnR continuent de progresser. Mais leur rythme semble aujourd’hui freiné par un manque de volonté politique.

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Dans les semaines à venir, nous ferons le point sur les différentes filières renouvelables françaises, entre bilan 2018, objectifs gouvernementaux et perspectives réelles. Rendez-vous en février 2019 pour ouvrir ces études, avec l’éolien et le photovoltaïque.

 

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